SELME Matthieu Auteur photographe panoramiste 360

Comment réaliser un panoramique à 360° en cerf-volant - partie 2/3
Seconde semaine : la prise de vue aérienne

1) Quel couple boitier-objectif choisir ?

1- Un appareil photo compact ?

On peut difficilement utiliser un appareil compact avec objectif intégré, car même en mettant la plus petite focale, il faut un trop grand nombre de photos pour couvrir toute la sphère. Déjà qu'un tel assemblage n'est pas des plus aisé au sol, alors en cerf-volant, cela devient quasiment irréalisable !

1- Un boitier reflex ?

Avec un boitier de type reflex Canon Eos 400D, et un objectif Tokina 10-17mm, il faut compter entre 500 et 600g pour le boitier avec les accessoires et 350g pour l'objectif. Il faut enfin une nacelle, comportant un moteur, une alimentation, un système de stabilisation : 350g voir 400g afin de transporter tout cet équipement. Au total, on dépasse allègrement 1500g à transporter, cela commence à faire un sacré poids à mettre sur la ligne d'un cerf-volant !

2- Un hybride ?

Il y a quelques temps sont sortis les boitiers Nex, puis les formats micro 4/3. Ce genre de boitier est intéressant pour la pratique de la photo aérienne, car ils ont des menus personnalisables et un poids plume ! Sur des appareils photos utilisant le format micro 4/3, l'objectif Samyang 7.5mm convient parfaitement à la pratique de la photographie panoramique.

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Tranche du Panasonic GF1


Attention :il faut veiller à ce qu'il y ait une prise pour la télécommande sur le boitier ! Par exemple chez Panasonic, le GF1 a cette prise, puis dans la même gamme, ni le GF2, ni le GF3 ne l'ont : impossible de déclencher à distance l'appareil photo !

Maintenant que l'appareil photo et l'objectif sont choisis, pour que les photos s'assemblent correctement, il faut positionner le plus précisément possible l'appareil photo une fois en l'air.

2) Comment positionner l'appareil photo sur un trépied ?

Pour réaliser un sphérique au sol, et être certain qu'il n'y aura pas de problèmes de raccord, il faut faire :

– 6 photos tout autour de soi, puis 1 photo du zénith et 1 photo du nadir, ou encore mieux :

– 6 photos l'appareil photo incliné de 30° vers le zénith, et 6 photos l'appareil photo incliné de 30° vers le nadir.

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-> Voir le panorama au sommet du Pollux (4050m) dans le Mont Rose

( On remarque les 6 photos avec l'appareil incliné de 30° vers le zénith, et les 6 photos l'appareil incliné de 30° vers la nadir, et enfin 1 photo du nadir avec le trépied décalé pour voir la neige )

Dans les 2 méthodes de prises de vue, à un moment où à un autre, il faut bouger physiquement le boitier pour prendre une série de photos "vers le haut". En l'air, il va être difficile de régler l'appareil photo, à moins d'avoir une télécommande permettant de piloter des moteurs. Cependant, toujours dans le but d'être le plus léger possible (je fais beaucoup de randonnées / Trek / alpinisme, en autonomie), il était hors de question que j'emporte une radio complète et sa batterie, plusieurs moteurs sur la nacelle et leurs batteries, l'appareil photo et sa batterie, le module de réception radio et sa batterieJ'ai donc cherché une méthode de prise de vue permettant la réalisation d'un panorama sphérique aérien, avec un équipement minimal en l'air : comment positionner l'appareil photo sur la nacelle ?

3) Comment positionner l'appareil photo sur la nacelle ?

Pour cela, un peu de théorie, devant l'ordinateur : j‘ai fabriqué 7 images fictives (respectant les dimensions en pixels de mon appareil photo), de couleurs différentes, afin de bien les différencier.

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Création des 7 images fictives, colorées pour les repérer facilement !

Puis j'ai chargé ces 7 images dans le logiciel d'assemblage d'images Hugin et je leur ai donné à chacune une valeur de lacet, tangage et roulis. Les termes de lacet, tangage et roulis sont empruntés au monde aéronautique :

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( Image issue du site de lavionnaire)

Cela permet de forcer le positionnement des images sur la sphère, puisqu'évidemment il n'y a aucun point de contrôle entre ces images fictives… Je vois ainsi comment les placer au mieux, en jouant sur les 3 paramètres (lacet, tangage, roulis) pour avoir un recouvrement optimal entre les images.

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Réglage du lacet, tangage et roulis pour chaque image

Je vous livre ici directement la conclusion de mes recherches : les valeurs optimisées. La meilleure solution est je pense d'incliner l'appareil photo sur la nacelle vers le bas de 25° : c'est ce qu'on appelle le tangage. Il faut aussi incliner l'appareil photo sur lui-même, dans une position intermédiaire entre le portrait et le paysage, de 70° : c'est le roulis. (Il y a des photos de la nacelle un peu plus bas pour les impatients !)

Pour résumer :
Tangage : l'angle de 25°, incliné vers le nadir (c'est pour ça qu'on voit l'image verte couvrir complétement le bas de l'image, les autres font de même, mais sont cachées derrière)

Roulis : l'angle de 70° : le boitier n'est ni à la verticale, ni à l'horizontale, mais entre les deux. (on remarque l'inclinaison des images vers la gauche)

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Les images couvrent toute la surface : il n'y a aucun trou !

Les images sont déformées à cause de la projection sphérique sur un plan…

Ainsi, l'appareil photo se charge de prendre une série de photos couvrant le sol, l'horizon, et une bonne partie du ciel. Pour la zone située au zénith (en rose sur la photo précédente), il me suffit tout simplement de prendre une photo … à partir du sol, et de la rajouter lors de l'assemblage des images !

J'adopte donc une prise de vue en 7 photos :
- une photo du zénith, prise à partir du sol,
- 6 photos du sol, de l'horizon, et un peu de ciel, prises en cerf-volant.
Pour les plus curieux, voici le lien vers un article détaillant toute la procédure illustrée par des captures d'écran, expliquant pourquoi les réglages de 25° pour le tangage et un roulis de 70° sont les plus pertinents.
Il ne reste plus qu'à construire la nacelle, en respectant les angles donnés ci-dessus, avant de passer à la prise de vue !

4) La nacelle en photographie aérienne sphérique

Les deux nacelles que je vous présente ici sont spécifiques à ma pratique de la photographie aérienne sphérique. En effet, le but recherché est de faire un panoramique sphérique à 360°, en l'air. Lorsque l'utilisateur visionne le panoramique sphérique, il a vraiment la sensation d'être un oiseau, et de pouvoir regarder, à sa guise, tout autour de lui. On remarque sur les photos ci-dessous les 2 angles importants trouvés précédemment. Deux nacelles permettant de réaliser des panoramiques sphériques aériens :


Le roulis de 70° (les cercles bleus)

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(Sur ces photos, l'angle entouré mesure 160° : 90°+70°)

Le tangage de 25° (les cercles jaunes)

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La nacelle de gauche ( 250 g) est une évolution de celle de droite ( 615 g)

5) Quels réglages faut-il choisir lors de la prise de vue ?

Lorsque je réalise un panoramique au sol, avant de déclencher, je tourne tout autour de moi avec l'appareil photo, pour saisir l'ambiance générale et voir quels paramètres adopter (vitesse, ouverture, balance des blancs manuelle fixée). Afin de réduire fortement les zones sur-exposées et sous-exposées, je brackette au maximum de ce que propose le boitier : il est alors facile d'atténuer les zones sur-exposées ou sous-exposées, en utilisant des logiciels comme enfuseGui, Tufuse, ou Bracketeer qui font une fusion des images (à ne pas confondre avec le HDR !). Le rendu est beaucoup plus réaliste en fusion : ainsi sur mon site, 96% des panoramas sont réalisés en fusion, et pourtant si on ne le sait pas, on ne le détecte pas, à l'inverse d'une image HDR…

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-> Visionner le panorama du Kala Patthar (Népal, 5645m)

Cette petite parenthèse de la photographie panoramique au sol nous permet d'aborder la prise de vue aérienne. Pour l'instant, il m'a été impossible de ramener une série d'images brackettées prises en cerf-volant, tout simplement car l'ensemble bouge énormément une fois en l'air ! Et si je veux faire une fusion, il faut que les images soient parfaitement alignées… Je suis donc en train de réfléchir à un système plus stable en l'air… pour tenter le bracketting aérien à 360° ! C'est un sujet ambitieux…

En attendant, pour choisir les réglages à apporter au boitier, je procède comme pour un panoramique terrestre : je tourne autour de moi, pour saisir l'ambiance globale au niveau du sol. Puis je sous-expose un peu, car en l'air, l'ambiance générale est un peu plus lumineuse qu'au sol, mais je reste en mode manuel : tout est fixé à l'avance, au sol. Puisque l'on ne peut pas bracketter pour récupérer des zones franchement sous-exposées ou sur-exposées, l'enregistrement en mode RAW peut être intéressant. Ainsi, lors du développement du fichier RAW, on peut sortir des images propres, avec une exposition identique sur toute la série de photos.
Mais à ce sujet, comment choisir la bonne série d'image ? Mon appareil photo déclenche sans cesse, à raison d'une image par seconde. En me dépêchant, il est alors courant d'avoir plus de 400 images sur la carte mémoire… Il est fastidieux de retrouver la bonne série d'images, celle où l'appareil photo était au plus haut, là où il avait le moins bougé et était resté sur place en bougeant le moins possible.

6) Comment choisir la bonne série de photos ?

L'appareil photo est à la bonne altitude, le vent souffle régulièrement, et l'ensemble nacelle-appareil photo est presque immobile dans le ciel, ne fait pas des sauts sur place, ou des grandes traversées dans le ciel ? Alors la série de photo a de fortes chances de s'assembler correctement !
Si vous êtes accompagné, c'est le mieux. Il suffit de demander à la personne à vos côtés de mettre un bras à l'horizontale, par exemple le bras gauche, pendant 30-40s. C'est tout simplement un repère visuel, permettant de retrouver facilement la bonne série d'image de retour à la maison. Ma nacelle fait un tour sur elle-même en 25s, donc si la personne reste 30-40s le bras levé, je le verrais forcément sur quelques photos. En effet, les photos se ressemblant toutes, il suffit de chercher celles où la personne a un bras levé.

Si entre temps le vent faiblit, ou que votre appareil photo bouge un peu trop, il suffit alors de dire à la personne de baisser le bras gauche, puis de lever le droit : cela fait un deuxième repère visuel. Ou encore de lever les 2 bras… Attention, le bras gauche de la personne se retrouvera vers la droite sur la photo... Dans l'aperçu des images, il est alors aisé de retrouver la série d'images où la personne a le « bon » bras levé, celui où vous jugez que l'ensemble "nacelle + appareil photo" a le moins bougé et était le plus stable en l'air.

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J'étais tout seul lors de la prise de vue aérienne à 360° du pont Albert Louppe de Brest

-> Visionner le panorama aérien à 360°

Il faut alors développer vos fichiers RAW avec votre logiciel de traitement favoris, en conservant pour toute la série d'images les mêmes paramètres, afin de faciliter l'assemblage et ne pas créer de zones plus claires ou plus sombres !

Enfin, il vous suffit de prendre votre logiciel d'assemblage favoris, et d'y inclure vos images. Dans le prochain article, je développe cette partie en utilisant le logiciel Hugin, car la méthode que j'utilise pour un panorama aérien diffère un peu de celle utilisée pour un panoramique pris au sol.




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